Education prioritaire : où en est-on ?

Rédigé le 06/10/2025


La Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance vient de publier un rapport sur l'Education Prioritaire. 

La CFTC-EPR prend note de quelques éléments de ce rapport, ci-dessous.

En France, près d’un élève sur cinq est inscrit en éducation prioritaire (EP), principalement dans les réseaux REP et REP+. Ces établissements regroupent une population fortement défavorisée : 70 % des collégiens en REP+ proviennent de familles ouvrières ou inactives, contre 35 % dans les établissements publics hors EP. Dans le secteur privé, cette concentration sociale est absente : aucun collège n’y accueille une majorité d’élèves issus de milieux modestes. La ségrégation tend ainsi à s’accentuer, notamment en REP+, sous l’effet de stratégies d’évitement.

Des inégalités qui apparaissent très tôt
Dès le primaire, les écarts de niveau se manifestent, surtout en mathématiques et en résolution de problèmes. Les élèves du privé affichent de meilleurs résultats, mais cette différence s’explique en partie par leur origine sociale plus favorable. Certains progrès sont cependant notés, par exemple en anglais.

Des moyens renforcés depuis 2017
L’éducation prioritaire bénéficie de dispositifs spécifiques, comme le dédoublement des classes de GS, CP et CE1 en REP+. Cette mesure a permis de réduire la taille des classes et d’améliorer les apprentissages, en particulier au CP, tout en favorisant un climat de classe plus serein.

Des parcours scolaires moins favorables
Les collégiens d’EP accèdent moins souvent aux filières générales ou technologiques : 52 % en REP+, 58 % en REP, contre 64 % hors EP. Les établissements REP+ concentrent également davantage de dispositifs spécialisés (Segpa, ULIS, UPE2A) et connaissent un absentéisme plus élevé (13 % contre 4 % hors EP). Leur offre éducative est aussi plus limitée, notamment en matière d’options culturelles et linguistiques.

Un contexte d’enseignement difficile
Près d’un quart des enseignants exercent en EP, souvent au début de leur carrière. Plus jeunes que la moyenne, ils expriment un ressenti plus négatif : climat scolaire jugé moins favorable, discipline difficile à maintenir, sentiment d’exposition plus fréquent à des atteintes.

Un bilan préoccupant
Quarante ans après la création des ZEP, l’objectif de réduction des inégalités scolaires reste largement entravé. Les REP+ concentrent une grande partie des difficultés dans un contexte de faible mixité sociale. Les écarts persistants entre public et privé, entre EP et hors EP, soulignent que l’éducation prioritaire ne parvient pas à neutraliser l’influence de l’origine sociale. Sans une politique ambitieuse en faveur de la mixité, les inégalités risquent de se maintenir, voire de s’aggraver, au fil des générations.

La CFTC-EPR constate, quarante ans après la création des ZEP, l’éducation prioritaire, loin d’atteindre pleinement son objectif de réduction des inégalités scolaires, se heurte à une concentration croissante des difficultés et à une ségrégation sociale toujours plus marquée. Les REP et REP+ accueillent une majorité d’élèves issus de milieux défavorisés, alors que le privé reste largement épargné par cette réalité. Cette situation génère une ghettoïsation qui compromet la mixité scolaire et creuse les écarts de réussite dès le primaire.

Face à ce constat, la CFTC Enseignement Public et Recherche revendique :

  1. Une politique ambitieuse de mixité sociale

    • Mise en œuvre de mesures concrètes pour diversifier la composition sociale des établissements publics.
    • Révision de la carte scolaire afin de limiter les stratégies d’évitement et de favoriser une meilleure répartition des élèves.
  2. Des moyens renforcés et pérennisés

    • Maintien et extension du dédoublement des classes, accompagné de ressources pédagogiques adaptées.
    • Réduction des effectifs dans toutes les classes de l’éducation prioritaire, afin d’offrir un suivi individualisé et une meilleure qualité d’apprentissage.
    • Formation suivie et diplômante pour les enseignants
  3. Une valorisation des enseignants en EP

    • Reconnaissance financière et statutaire du travail mené dans des conditions plus difficiles.
    • Mise en place de véritables parcours professionnels attractifs pour stabiliser les équipes et éviter un turn-over pénalisant.
    • Renforcement de la formation initiale et continue sur la gestion de la diversité sociale et les pédagogies adaptées.
  4. Un accompagnement éducatif élargi

    • Développement d’une offre culturelle, linguistique et sportive équivalente à celle des établissements hors EP.
    • Renforcement des dispositifs de soutien aux élèves et à leurs familles pour lutter contre l’absentéisme et encourager la réussite scolaire.
    • Révision du bâti scolaire donnant pour une plus grande appétence de l'école dans les zones difficiles.

La CFTC rappelle que l’égalité des chances ne peut se résumer à des dispositifs compensatoires isolés. Elle nécessite une volonté politique forte, une véritable stratégie de mixité et un engagement durable en faveur de la justice sociale. Sans ces changements, le risque est de voir les inégalités s’ancrer toujours davantage et de compromettre la mission première de l’école publique : assurer la réussite de tous.